Histoire de la Charité - Tome 4 - Première partie

Dans ce quatrième volume, Léon Lallemand poursuit son vaste panorama historique de la charité chrétienne, en se concentrant sur la période des Temps modernes, depuis le Concile de Trente jusqu’aux réformes hospitalières du XIXe siècle. L’auteur examine les transformations profondes que connut la bienfaisance chrétienne à une époque marquée par la Réforme protestante, les épidémies dévastatrices et l’essor d’un nouvel ordre social.

La première partie s’ouvre sur une étude des théories en matière d’assistance, opposant la vision catholique, fondée sur la valeur méritoire des œuvres, à la doctrine protestante qui met l’accent sur la foi personnelle. Lallemand y décrit avec précision les débats suscités par ces conceptions rivales et la manière dont le Concile de Trente réaffirma la place essentielle des œuvres de miséricorde dans la vie chrétienne.

Vient ensuite une vaste fresque consacrée aux congrégations hospitalières nées de ce renouveau spirituel : les Antonins, les disciples de saint Jean de Dieu, saint Camille de Lellis et surtout saint Vincent de Paul, dont les Filles de la Charité marquèrent profondément la pratique de l’assistance au XVIIe siècle. Ces figures de dévouement traduisent la permanence d’un idéal évangélique face aux besoins nouveaux de la société moderne.

La seconde section aborde la question des maladies épidémiques, des pestes et des grandes peurs collectives qu’elles suscitèrent à travers l’Europe. Lallemand y analyse les réponses religieuses et sociales : quarantaines, processions, prières publiques, création de bureaux de santé et amélioration de l’hygiène urbaine. Il montre comment la charité s’organisa dans ces temps de détresse, mobilisant clergé, médecins et simples fidèles.

Une partie essentielle de l’ouvrage est consacrée à la lutte contre la mendicité, phénomène social endémique des XVIe et XVIIe siècles. L’auteur expose les législations européennes, parfois impitoyables, qui tentèrent d’encadrer ou de supprimer la mendicité, depuis les peines corporelles jusqu’au renfermement des pauvres. À travers une documentation foisonnante, Lallemand dénonce les abus tout en soulignant la continuité de l’esprit chrétien d’assistance, même au cœur des réformes coercitives.

Enfin, le tome s’achève sur une étude approfondie de l’organisation des établissements hospitaliers : leur administration, leurs ressources, leur architecture, ainsi que la vie spirituelle et matérielle des malades et des soignants. L’auteur y montre comment la charité, loin de disparaître, se transforma progressivement en institution, conciliant dévouement religieux et rationalisation des secours.

Ce volume, d’une érudition remarquable, éclaire les tensions entre foi et raison, misère et justice sociale, qui accompagnèrent la naissance du monde moderne. Il révèle aussi la grandeur silencieuse de ceux qui, dans les hôpitaux et les asiles, incarnèrent la miséricorde chrétienne au milieu des bouleversements de l’histoire.