Histoire des commandements de l'Eglise

Dans Histoire des commandements de l'Église (1909), l’abbé Antoine Villien propose une enquête historique rigoureuse sur la genèse, la systématisation et l’application des principaux préceptes imposés par la discipline ecclésiastique. L’ouvrage examine successivement chaque commandement — participation à la messe, abstention des travaux serviles, célébration des fêtes, confession et communion pascales, jeûne et vigiles, abstinences diverses, ainsi que la dîme — en replaçant chaque règle dans son contexte doctrinal, liturgique, canonique et social.

Villien part des sources anciennes : pratiques apostoliques, témoignages patristiques et conciliaires, puis suit l’évolution jusqu’aux grandes étapes médiévales (carolingienne, grégorienne, conciles du Moyen Âge) et aux règlements postérieurs (en particulier la codification du droit canonique). À propos du premier commandement, il analyse l’obligation d’assister à la messe et son application aux différentes catégories sociales (fidèles, serfs, religieux), les débats sur la durée de l’assistance et la conformité aux rubriques. Pour les jours de repos et de fêtes, il reconstitue la transition entre une discipline rigoureuse (chômages, prohibitions des marchés et plaids) et l’introduction progressive de dispenses et d’atténuations.

Les chapitres consacrés à la confession et à la communion donnent une synthèse des décisions conciliaires (notamment le IVe concile du Latran) qui imposent la confession annuelle et la communion pascale, en abordant les exceptions, l’âge de l’obligation et les sanctions prévues. Le traitement du jeûne et des abstinences étudie les formes (Carême, Quatre-Temps, vigiles, Rogations), leur essence spirituelle et leur réglementation pratique — avec l’enchaînement des dispenses et la diffusion d’une jurisprudence ecclésiastique locale.

D’un point de vue méthodologique, Villien s’appuie sur une documentation large : conciles, statuts synodaux, capitulaires carolingiens, coutumiers, décrets pontificaux et décisions épiscopales. L’étude distingue soigneusement la norme canonique de la pratique pastorale, montre comment la législation séculière a parfois sanctionné le précepte ecclésiastique, et comment l’Église a concédé des mesures de bienveillance (dispenses, réductions de fêtes chômées) en fonction des circonstances sociales et économiques.

Le chapitre final sur les dîmes offre une synthèse économique et juridique : origine du principe, modalités d’application pendant la période carolingienne et au-delà, variations dans les régions hors de l’empire carolingien, et transformations à partir du XIIe siècle. L’ouvrage se conclut par des annexes utiles : tables de conciles et statuts cités, liste des papes, évêques et auteurs mentionnés, qui font de ce livre un manuel de référence pour qui étudie la discipline chrétienne dans ses rapports avec la société.

Au total, Villien offre un panorama historico-juridique accessible aux clercs et aux érudits : il met en évidence la plasticité des commandements de l’Église, soumis à l’autorité romaine mais aussi à l’adaptation pastorale, et il restitue la logique interne qui a conduit à la formation de la discipline ecclésiastique telle que la connaissait l’Église catholique avant les réformes modernes.